
Dans les ruelles d’Alger Centre, les boutiques de décoration attirent les foules. Lanternes, bougies, guirlandes, étoiles et croissants illuminent les intérieurs algériens. Depuis quelques années, cette pratique se répand, transformant les foyers pour accueillir le mois sacré avec faste.
“Il faut accueillir ce mois avec joie et bonne humeur. Ma mère ressortait un service de vaisselle spécial Ramadan et on aménageait un coin de prière. Repeindre la maison était presque une tradition en Chaabane”, raconte Fatima, une mère de famille en quête de toile cirée.
Mais d’où vient cette coutume ? L’histoire raconte qu’à l’ère fatimide, le calife Al-Moezz li-Dine Allah est entré au Caire une nuit de Ramadan, accueilli par une marée de lanternes. Ainsi naquit la tradition d’illuminer les rues et les maisons.

“Ce sont des innovations modernes. Les fawaniss viennent d’Égypte, ce n’est pas une tradition algérienne”, affirme Ahmed, un client sceptique face à cette mode. Pourtant, les vendeurs peinent à suivre la demande, confirmant une véritable frénésie d’achat.
Décoration: Un boom du e-commerce
Sur les réseaux sociaux et les marketplaces, la demande sur la décoration spécial ramadan explose. Du textile à l’électroménager, tout s’arrache. “Ramadan est notre meilleure saison. Nos chiffres d’affaires compensent les pertes de l’année”, confie Abderraouf, e-commerçant en électroménager.
Les femmes, souvent moteurs de ces achats, investissent dans des coins de prière tendance, des livres du Coran colorés et personnalisés, des tapis de prière assortis et des robes d’hôtesse. Même les marchands de meubles font fortune. “Ramadan, c’est le moment des grands repas et des réunions familiales. La table devient essentielle”, explique Salim, vendeur de meubles à Koléa. La concurrence est rude, et les e-commerçants redoublent d’efforts jusqu’aux derniers jours du mois sacré. Les budgets publicitaires doublent de volume.
Un Ramadan sous le feu des projecteurs

L’essor de cette tendance de décoration s’explique en partie par l’influence des réseaux sociaux. Instagram, TikTok et YouTube regorgent de créateurs de contenu exhibant leurs intérieurs soigneusement décorés. “On a fait de Ramadan une sorte de Noël musulman. Les marques ont compris que nous sommes de gros consommateurs”, déplore Zahra.
“Ce qui compte, c’est l’humilité et la solidarité. Plutôt que d’acheter des décorations, je préfère aider une famille dans le besoin”, affirme Sidali, un sexagénaire attaché aux valeurs traditionnelles.
Si cette démarche peut sembler superficielle, elle témoigne aussi d’un besoin de renouveau et de convivialité. Entre tradition et modernité, le Ramadan algérien se réinvente, oscillant entre spiritualité et marketing.



